L’idée d’une réglementation de la DeFi fait son chemin

Difficile d’encadrer une activité par nature décentralisée et dont il n’existe pas de définition claire. Pourtant, les différentes pistes de réglementation de la finance décentralisée, ou DeFi, abordées par la consultation menée par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) semblent bien perçues par la majorité des répondants de cet écosystème. Plutôt que d’en avoir donné une définition stricte, l’ACPR raisonne avec un «faisceau de critères» correspondant aux différentes strates qui la composent : l’infrastructure blockchain, la couche applicative des services et les dispositifs d’accès des utilisateurs à ces services.

Concernant l’infrastructure blockchain, si de nombreux répondants estiment que la DeFi peut être abritée par des blockchains publiques, ils admettent la nécessité d’en renforcer la résilience en définissant des «standards de sécurité» auxquels elles doivent répondre. Même si, de l’aveu de l’ACPR, «les divergences sont grandes (…) quant à la manière d’y parvenir», le fait même d’évoquer ces «standards» constitue une avancée de la part d’acteurs qui y ont souvent été opposés.

Autre évolution dans les mentalités, l’intervention des organismes publics dans le dispositif de l’infrastructure est aussi largement acceptée. Les autorités publiques pourraient, par exemple, gérer des nœuds de certaines blockchains publiques, «afin notamment d’aider à la restauration du registre après une attaque». Une telle position est «assez consensuelle parmi les participants». Les répondants à la consultation, constitués par des banques, des personnes physiques, des prestataires de services numériques ou encore des acteurs de la crypto, accordent une confiance – nouvelle – aux organismes publics face aux attaques.

Certains répondants sont même d’accord sur le principe d’une certification des smart contracts. Ces instruments correspondent à des algorithmes irrévocables qui permettent aux informations de circuler sur les blockchains. Il existe une multitude de smart contracts, chacun d’entre eux pouvant gérer des informations plus ou moins complexes, à la manière de contrats papier. «Le périmètre d’une telle certification ainsi que ses modalités pratiques font davantage débat», admet l’ACPR. Mais la consultation ne montre pas un rejet pur et simple de cette éventualité.

Traitement spécifique

Enfin, un large consensus se dégage sur l’encadrement des intermédiaires ou des interfaces avec les utilisateurs. A condition que cet encadrement soit distinct des intermédiaires financiers classiques. «Un point d’attention réside dans la façon dont les interfaces décentralisées (en développement rapide) devront être encadrées en pratique, de nombreux retours de la consultation indiquant qu’elles ne peuvent l’être ‘de la même manière’ que les intermédiaires centralisés», indique l’ACPR.


Les résultats de cette consultation ne resteront, a priori, pas lettre morte. L’ACPR assure qu’ils viendront nourrir les contributions de l’Autorité à la réflexion au niveau européen sur les suites à apporter au règlement MiCA sur les marchés de cryptoactifs. «Il apparaît possible et souhaitable d’édicter des mesures relatives à la fiabilité des infrastructures blockchain sur lesquelles la DeFi – ou d’autres formes de finance tokenisée – seraient amenées à se développer», assure l’ACPR. Possible, certes, mais cela ne sera pas facile de faire admettre des règles à une communauté qui n’y est pas habituée.